Communiqués

Le seul outil des magistrats et magistrates, c’est la loi

Après la condamnation de Marine Le Pen et de plusieurs membres du RN pour emplois fictifs et détournement de fonds publics européens par le tribunal de Paris le 31 mars, aussi bien l’extrême droite que la droite et une partie de la gauche, voire de l’extrême gauche, se sont mises vent debout contre la justice pour défendre Marine Le Pen, alors même que 57 % des Français considèrent la sentence prononcée comme juste. Devant cette fronde qui met à mal la neutralité de la justice, le Syndicat de la magistrature a émis un communiqué pour défendre l’État de droit, dont semblent peu se soucier les politiciens prompts à défendre leurs prérogatives. Voici ci-dessous le communiqué.

Il n’appartient pas au Syndicat de la magistrature de commenter les décisions de justice, leur pertinence ou leur raison d’être. Sa mission est de rappeler la place, le rôle et le statut de l’autorité judiciaire dans un régime démocratique de séparation des pouvoirs ainsi que de la défendre contre les attaques dirigées contre ses membres.

Le Syndicat de la magistrature a pris connaissance par voie de presse des nombreuses remises en cause de l’autorité judiciaire, des accusations de « justice partiale », de « décision politique contraire à l’État de droit » et de « déni de démocratie », à la suite de la décision prononcée par le tribunal correctionnel de Paris ce 31 mars 2025 dans le cadre de l’affaire dite « des assistants parlementaires du Front national ».

Des magistrat·es ont été personnellement et violemment pris·es à parti. Certains médias sont allés jusqu’à diffuser la photographie de la présidente du tribunal ayant rendu la décision, suggérant que la condamnation en cause résulterait d’un face-à-face entre deux individualités, là où un tribunal a statué en droit au terme d’un processus juridictionnel.

Ces offensives contre les magistrat·es et les tentatives de discrédit de l’institution judiciaire sous l’accusation de « justice politisée » sont intolérables dans un État de droit. Elles sont adossées à un pré-supposé confinant au complotisme, qui voudrait que les juges aient un agenda politique, un projet de conquête du pouvoir ou un désir de vengeance à l’égard « des politiques » en général, dont les mobiles allégués varient selon les circonstances.

Il convient de rappeler qu’aucun·e magistrat·e, aucune formation de jugement, ni individuellement ni collectivement, ne saurait être associé, assimilé, ou tenu comptable des prises de position passées ou à venir d’une organisation syndicale indépendante – fussent-elles de portée politique, comme le permet au demeurant toute expression syndicale.

Affirmer que « les juges » – qui, rappelons-le, décident en collégialité – prendraient leurs décisions en fonction de leurs préférences ou de leurs convictions personnelles revient à disqualifier le cœur même du travail juridictionnel. Les juges appliquent à des cas particuliers les lois votées par les représentant·es du peuple, élu·es de la Nation.

Indépendants du politique comme de la politique lorsqu’ils exercent leur office juridictionnel, les juges ont pour mission de trouver un juste équilibre, dans le cadre de l’application de la loi, entre la nature de l’infraction, son degré de gravité et la situation particulière de la personne qu’ils ont à juger. Si l’individualisation de la peine s’impose aux juges, elle n’est jamais synonyme de traitement de faveur ou de défaveur : il en va de l’égalité de toutes et tous devant la loi et de la préservation de l’État de droit.

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