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Jacoto : l’esclave de la Rivière de l’Est qui rêvait de liberté

La Réunion a été colonisée par les Français. On situe son occupation définitive à partir de 1663. Mais pour que cette terre située dans l’océan Indien soit rentable, avec cette colonisation, les 1ers colons ont aussi épousé les thèses raciales et esclavagistes qui prédominaient alors.

Si au début de la colonisation les couples franco-malgaches sont présents, l’asservissement des seconds par les premiers vont vite changer la donne. Tant et si bien que le 1er décembre 1674, le vice-roi des Indes, Jacob de la Haye, par ordonnance interdit les unions interraciaux. Commence alors la descente aux enfer pour tous les Noirs posant le pied sur cette terre française.

En 1672, les premiers esclaves arrivent. Ils ne seront que 15. Mais ce ne sera pas terminé puisqu’entre 1696 et 1698, des hommes et femmes rendus à l’état servile seront débarqués sur ce bout de terre française. Même les religieux catholiques ont des esclaves. Puisqu’en 1687, le père Dominique de la Conception vend un enfant de 12 ans à un habitant écrit Albert Jauze. Celui-ci serait originaire des Indes.

En 1704 on recense 311 esclaves sur ce caillou du bout du monde. En 1713 on recense 538 esclaves. Sous le gouverneur de La Bourdonnais, 1 200 à 1 300 esclaves sont introduits annuellement sur l’île.

La soumission de cette main servile et réduite au statut de meuble passe par le Code noir. Un livre élaboré par « Jean-Baptiste Colbert sous l’instruction de Louis XIV avec l’aide des intendants et des gouverneurs des iles » écrit dans une tribune du Monde, l’historien américain Jacob Soll. Ce Code est promulgué en 1685 et les colons des terres lointaines ne vont pas s’en priver.

C’est dans ce cadre, ce contexte dit-on qu’apparait la figure de Jacoto.

Jacoto est un homme avant tout. Mais dans cette société d’horreur, il a le malheur d’être né malgache et d’avoir été réduit au seul statut d’esclave et d’être la propriété meuble de Romain Monier qui est un habitant de l’Est.

Jacoto est un homme qui rêve de liberté dans cette société raciste et servile. Il fomente donc une rébellion et s’imagine faire tomber l’institution coloniale en place.

Pour cela, il veut l’extermination des Blancs présents à la Comédie de Saint-Denis et le massacre des colons, de ces hommes qui se disent maîtres des esclaves.

L’insurrection aurait dû commencer par l’incendie d’une maison.

Mais las, c’était sans compter sur des dénonciations qui aboutissent le 18 octobre 1799 à son arrestation et celle de ceux qui auraient aimé lui donner main forte.

A l’issue du procès de Jacoto, le 18 novembre 1799, la sentence tombe :

  • 11 personnes sont condamnées à mort
  • 3 peines de prison sont prononcées

Pour Jacoto, et ceux qui l’auraient suivi à savoir Jean Marie, Jean-Baptiste, Morvan et Hilarion, si la mort est prononcée leur exécution va relever du spectacle morbide, glacial et sans dignité.

En effet ces 5 condamnés seront placés devant les futs de canon pour qu’ils soient explosés comme le relate la plaque commémorative en leur honneur au pied du Pont suspendu de la Rivière de l’Est.

Jacoto et ses compagnons étaient des hommes, mais ils ne sont pas nés au bon endroit et au bon moment. L’action qu’ils envisageaient était peut-être répréhensible aux yeux de la loi ou plutôt de l’ordre d’alors, car on ne saurait ériger le Code noir à une loi, mais c’était avant tout, au vu de leur situation d’asservis  la revendication d’une liberté dont on les avait privée.

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